Comment s'installer légalement
en habitat réversible ?

La réglementation d'urbanisme relative à l'habitat réversible, aussi appelé habitat léger, est récente et souvent méconnue des citoyens mais aussi des élus, voire des administrations.

Pour y voir plus clair, l'association Hameaux Légers oeuvre pour rendre accessible les contenus permettant à chacun de s'installer légalement et durablement en habitat réversible et pour faire appliquer la loi ALUR de 2014, trop souvent ignorée.

Le cadre légal de l'habitat réversible

Un statut récent et méconnu

Jusqu’en 2014, hormis pour les gens du voyage, l’habitat réversible permanent n’avait aucune qualification juridique. Il n’était pas possible d’y élire domicile et il régnait ainsi un flou sur la manière d’autoriser ou non ce type d’habitat, souvent confondu avec les “habitats légers de loisirs”, réservés à une utilisation saisonnière.
La loi ALUR est venue combler ce vide créant dans le code de l’urbanisme (art. R. 111-51) le statut de “résidence démontable constituant l’habitat permanent de leurs utilisateurs”, défini par les critères suivants :

  • « Occupées au moins 8 mois par an »
  • « Sans fondations »
  • « Facilement et rapidement démontable »
    La loi précise par ailleurs que cette installation peut être autonome vis-à-vis des réseaux publics (eau, électricité, assainissement), c’est à dire qu’il n’est pas obligatoire d’être raccordé.

La possibilité de s’installer en zone non-constructible

Suite à la loi ALUR, le code de l’urbanisme précise également (article L. 151-13) que les habitats réversibles, qualifiés de “résidences démontables constituant l’habitat permanent de leurs utilisateurs”, peuvent être installés dans des STECAL (secteurs de taille et de capacité limitées). Ces habitats peuvent bien évidemment être aussi installés sur des terrains constructibles.
Les STECAL sont des secteurs délimités dans les zones naturelles, agricoles ou forestières, pour y accueillir des constructions spécifiques. Il s’agit donc d’une dérogation au principe de non-constructibilité de ces espaces, subordonnée au respect des principes suivants :

  • protection des espaces naturels, agricoles et forestiers
  • préservation et remise en bon état des continuités écologiques
  • consommation raisonnée des terres
  • réduction des flux de déplacements
  • répartition équilibrée entre emploi, habitat, commerces et services
    Les STECAL peuvent accueillir tout type de construction précisé dans le PLU. S’il existe très peu de STECAL pour l’habitat réversible, il en existe de nombreux pour des activités économiques, touristiques ou encore pour de l’habitat traditionnel.
    Suite à des dérives conduisant au mitage de certains espaces, le législateur a précisé que ces secteurs devaient être créés “à titre exceptionnel”, avec l’accord du préfet et après avis de la commission départementale de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF).

Des démarches administratives allégées

La loi prévoit (article L444-1) que l’aménagement de 2 résidences démontables ou plus est soumis à :

  • Permis d’aménager si la surface cumulée dépasse 40m2
  • Déclaration préalable de travaux sinon

Dans le cas de l’installation d’une seule résidence démontable, c’est le droit commun qui s’applique (Articles R421-14 et R421-17), c'est à dire :

  • Déclaration préalable de travaux si surface de plancher entre 5 et 20m²;
  • Permis de construire au-delà de 20m²

Toutes ces autorisations sont définitives, c’est à dire que l’administration ne peut peut pas vous demander de démonter votre résidence (sauf dans de rares circonstances exceptionnelles, valables pour tous les types de constructions).

Le permis d’aménager pour installer des résidences démontables est une démarche plus souple que le permis de construire, étant donné qu’il n’est pas requis de fournir une description précise ou des croquis des habitats qui seront installés mais de définir des zones d’implantation, comme dans un camping, ainsi que les éventuels réseaux et voiries qui seront aménagés. Il est donc préférable de demander l’aménagement de 2 résidences ou plus.

La demande de permis d’aménager s’effectue au moyen du formulaire Cerfa n° 1340906, et le délai de réponse est généralement de 3 mois à partir de la date du dépôt de la demande.
Une fois le permis obtenu, les tiers disposent d’un délai de 2 mois pour effectuer un recours, à compter de la date de début d'affichage de l'autorisation d'urbanisme sur le terrain.
Il est important d’effectuer l'affichage selon des formalités très précises (contenu, lisibilité, visibilité) pendant 2 mois continus et fortement recommandé de le faire constater par un huissier pour limiter les risques de contestation.

Les autres statuts possibles

Si les“résidences démontables constituant l’habitat permanent de leurs utilisateurs” représentent l’option la plus sécurisante pour y vivre de manière permanente, il existe d’autres statuts correspondant à d’autres types d’habitats, pour lesquels la réglementation est différente.

Voici un tableau récapitulatif des différents statuts existants :
Cadre Légal de l'Habitat Léger

Intégrer l'habitat réversible dans les documents d'urbanisme

Identifier un terrain adapté ou une commune engagée

Il est important de comprendre que l’objectif de ces documents d’urbanisme est de minimiser les déplacements et les réseaux, limiter l’artificialisation des sols et protéger les espaces naturels, agricoles et la biodiversité.
Dans cette logique, ceux-ci cherchent à éviter le “mitage”, c’est à dire la création d’espaces urbanisés au milieu de la nature. Il sera donc difficile, voire impossible, d’obtenir une autorisation d’installer un habitat réversible sur un terrain qui n’est proche d’aucune construction existante.
De même, il est nécessaire que le terrain envisagé ne se situe pas dans une zone à risques (inondations, incendies, glissements de terrain, …); pour connaître les risques existants, consultez le PPR (plan de prévention des risques), s’il existe, ou adressez-vous à la mairie.

Si le terrain n’est pas déjà classé constructible ou STECAL autorisant l’installation de résidences démontables, il vous faudra convaincre la commune de modifier le plan d’urbanisme (voir plus bas).

Si vous n’avez pas de terrain identifié, il est souvent plus facile de commencer par trouver une commune volontaire pour accueillir votre projet, puis de lui demander de l’aide pour trouver un terrain adapté : les communes ont en effet souvent des terrains dont elles sont propriétaires ou peuvent en acquérir facilement grâce à leurs réseaux et à des outils comme les établissements publics fonciers (EPF).
L’idéal est de trouver une commune engagée dans un processus de révision de son plan local d’urbanisme (PLU) ou de création d’un PLU intercommunal (PLUi), ce qui est souvent le cas en période post-électorale.
Il est également plus facile de s’adresser à des communes déjà engagées dans une démarche écologique ou sociale; certaines sont répertoriées sur une carte collaborative consultable ici.

Obtenir le soutien des élus locaux

Pour convaincre les élus d’intégrer l’habitat réversible, il est important de mettre en valeur l’intérêt pour la commune; en cela un projet collectif comme un hameau léger est souvent plus facile à présenter.
En voici quelques exemples :

  • Attirer des jeunes et des familles afin de rajeunir la population et d’éviter la fermeture de classes de maternelle ou primaire, voire d’en rouvrir
  • Accueillir de nouvelles activités économiques, notamment agricoles, et consolider les activités existantes par l’augmentation de la consommation locale
  • Permettre l’accès au logement à des foyers ayant des difficultés à se loger en raison de la pression foncière exercée par les résidences secondaires, et renforcer la mixité sociale
  • Réaliser un projet innovant et écologique
  • Offrir la possibilité de vivre légalement en résidence démontable à des personnes qui choisissent ce mode de vie, souvent forcées de s’installer illégalement faute de zones dédiées dans les PLU, malgré la loi ALUR (2014)

Il est également important d’anticiper les peurs et interrogations courantes des élus; en voici quelques-unes :
voir arriver des personnes précaires, qui ne travaillent pas / ne s’insèrent pas (gens du voyage, hippies, punks…)
des constructions laides et/ou fragiles qui ne s’intègrent pas dans le paysage (caravanes…)
perdre du temps avec des bobos qui vont se débiner après le premier hiver et n’ont pas conscience de ce que c’est que la ruralité

La réalisation d’un beau dossier de présentation et des rencontres en physique peuvent permettre de rassurer les élus. Ce sera également plus facile si vous résidez déjà sur le territoire. Il est également recommandé d’être soutenu par des personnes de la commune ou d’institutions comme la communauté de commune, le Parc Naturel Régional si la commune y est située, le CAUE…

Inscrire le projet dans le plan d’urbanisme

Une fois la commune convaincue, il existe trois procédures pour autoriser l’installation de résidences démontables dans un PLU / PLUi :

  • Création (procédure qui dure 3 à 5 ans)
  • Révision (1 à 2 ans) - l’ensemble du document est refondu
  • Modification simplifiée (5 à 9 mois) - seuls certains zonages sont modifiés

Si la commune est déjà engagée dans une procédure de création (durée de 3 à 5 ans) ou de révision (1 à 2 ans) du PLU ou PLUi, il est possible d’intervenir à chaque étape de sa réalisation :

  • Diagnostic : faire recenser le besoin d’installer des habitats réversibles
  • Plan d’aménagement et de développement durable (PADD) : inscrire l’habitat réversible comme une stratégie pour répondre notamment aux besoins des jeunes ménages et expérimenter des modes de construction et d’habitat écologiques
  • Règlement : créer un ou plusieurs STECAL pour résidences démontables et/ou faire une OAP (orientation d’aménagement et de programmation) pour réserver une zone constructible à des résidences démontables

Dans le cas contraire, la commune peut réaliser une modification simplifiée de son PLU concernant une ou plusieurs zones uniquement, procédure assez rapide (5 à 9 mois) et peu coûteuse.
S’il n’y a pas de PLU et que la commune est soumise au RNU (règlement national d’urbanisme), il est possible d’obtenir une dérogation au principe de constructibilité limitée, sur délibération motivée du conseil municipal et avis conforme de la CDPENAF.

Exemple de projets réalisés légalement

Documents d'urbanisme prenant en compte l'habitat réversible

Sur ce lien voici tous les PLU et PLUi prenant en compte les habitats démontables à notre connaissance, que ce soit en créant des STECAL ou en leur dédiant des zones constructibles (merci de nous partager d'éventuels exemples supplémentaires ! )

Permis d'aménager

Très peu de permis d'aménager pour installer des résidences démontables ont été instruits à ce jour, les administrations sont donc souvent démunies. Il est ainsi très utile de leur partager des exemples de permis déjà acceptés, qui peuvent être trouvés sur ce lien.

Autres démarches

D'autres démarches sont possibles pour s'installer légalement sur un terrain non constructible hors STECAL, en général pour une durée déterminée (permis précaire, autorisation de stationner, ...). Des exemples de telles démarches sont accessibles sur ce lien.

Ressources complémentaires

  • Notre MOOC "S'installer en habitat réversible"(cours en ligne gratuit et accessible à toutes et tous) qui offre un maximum d’informations, et en particulier la séquence 3 "Réglementation".

  • Ici tous les PLU (ou PLUi) prenant en compte les habitats démontables à notre connaissance, que ce soit en créant des STECAL ou en leur dédiant des zones constructibles. Vous trouverez dans ce dossier des exemples de rédaction d'OAP et de règlements intégrant l'habitat réversible.

  • Ici des exemples de permis d'aménager acceptés par l'administration pour installer des résidences démontables.

  • Ici des exemples de démarches si vous souhaitez vous installer sur un terrain non constructible hors STECAL (permis précaire, autorisation de stationner, ...)

Focus : le permis d'aménager

Dans quel cadre le permis d'aménager s'applique-t-il ? Quelles sont les pièces à fournir ? Comment favoriser l'acceptation de sa demande ?
Suite à un webinaire organisé le 8 février 2023, vous trouverez ici une présentation détaillée sur le permis d'aménager.
Ainsi que l'enregistrement du webinaire : youtube.com/watch.

Ci-dessous, quelques réponses à des questions fréquentes.

Sur quel type de terrains le permis d'aménager s'applique-t-il ?

Principalement sur des terrains constructibles, c'est-à-dire les terrains de type 1AU dans le PLU. Les terrain 2AU ne sont pas constructibles : il faut que la commune modifie son PLU pour les passer en 1AU, et la tendance et à la réduction des zones constructibles. Les zones A et N ne sont pas constructibles.

L'installation sur un terrain inconstructible est uniquement possible dans le cadre des STECAL, des autorisations exceptionnelles qui permettent de construire sur un terrain agricole ou naturel, mais elles doivent être justifiées et sont très rarement accordées.

Si la commune vous demande un permis de construire alors que votre terrain est en zone 1AU, c'est que les élus ou les services techniques ne connaissent pas le cas particulier des résidences démontables constituant des habitations permanentes. Nous vous conseillons de les sensibiliser à cette question, de les renvoyer vers des ressources de Hameaux Légers, ou de vous retourner vers la DDTM.

Peut-on commencer à installer un habitat réversible pendant le délai de recours de 2 mois à partir de l'affichage de l'autorisation ?

Rien ne vous en empèche, mais c’est une prise de risque. S'il y a un recours contre votre autorisation et ce que celui-ci est validé, vous pourrez avoir à faire à la justice.

Un permis d'aménager est-il nécessaire dans le cadre d'un projet en bail emphytéotique ?

Le BE n’est pas une autorisation d’urbanisme, c’est un contrat qui donne droit à la jouissance d’un terrain, tout comme un contrat d'achat immobilier classique. Il ne vous exempte donc pas de demander les autorisations d'urbanisme pour construire un bâtiment ou installer un habitat réversible sur votre terrain.

Comment décider du nombre d'emplacements pour habitats réversibles par rapport à la taille du terrain ?

Sauf quand une règle de densité est fixée par le PLU, c'est le collectif qui décide du nombre d'emplacements. Toutefois, la tendance générale est à la densification. Avec les évolutions réglementaires et politiques (loi Zéro Artificialisation Net), l’objectif des collectivités est de réduire l’artificialisation des terres et de densifier. Actuellement, la norme est de 20 logement à l’hectare, soit 1 logement pour 500m2. C'est à peu près cette densité qu'on trouve au hameau léger du Placis, à Saint-André des Eaux.
L'enjeu est donc de créer à la fois de l’intimité et des espaces ouverts malgré une densité assez élevée : on peut penser à l’usage de la végétation mais aussi réfléchir à l’utilisation des espaces publics au delà des limites du terrain (un parc, un jardin partagé, etc.).

Peut-on demander un permis d'aménager pour des habitats démonables permanents d'habitation si l'on a déjà un permis de construire pour la maison commune ?

Oui.

Deux yourtes reliées par un couloir, ça compte comme deux ou un habitat révesible ?

Ce qui compte dans la loi est moins le nombre d’habitats que d’emplacements. Dans le cas d'un seul habitat, pour ne pas avoir à déposer un permis de construire et passer par une permis d'aménager, plus facile à obtenir, nous vous conseillons de déclarer au minimum deux emplacements.

Quand est-ce que l'on considère que l'on a fini les travaux (pour faire la DAACT)?

Lorsque l'aménagement du terrain est fini. L'installation des habitats réversible ne compte pas car ils peuvent être installés et désinstallés dans le temps.

Lorsque l'on doit demander un permis de construire (pour un bâtiment commun par exemple) et un permis d'aménager pour des habitats réversibles, pourquoi faire deux demandes séparées plutôt qu'une seule demande de permis d'aménager qui peut inclure une construction nouvelle ?

Dans les deux cas, ce sont les mêmes pièces à déposer. Vous ne gagnerez pas de temps à faire une demande commune. Et avec deux demandes, vous avez plus de chance d'avoir l'autorisation pour au moins l'une des deux.

Où trouver le plan des réseaux existants ?

En principe, vous les trouverez dans les "annexes sanitaires" du PLU. Mais attention, il est possible que votre PLU date et ne soit plus à jour : le plus sûr est de faire une demande de cercitificat d'urbanisme auprès de la mairie.

Doit-on payer des taxes dans le cadre d'une installation avec un permis d'aménager ?

Classiquement, la taxe d’aménagement est calculée en fonction du nombre de m2 de surface habitable et du nombre de places de parking. Vous pouvez faire des simulations en ligne. Or, dans le cas du permis d'aménager, il y a un flou juridique car on ne déclare pas le nombre de m2. On ne peut donc pas payer une taxe sur la base de la surface habitable.

En attendant que ce flou juridique soit comblé par les services de l'Etat, vous pouvez soit déclarer un nombre moyen de m2, soit être taxé comme un habitat léger de loisir ou un emplacement de camping. Consulter la loi ici.

Si le PLU est en cours de révision, quand déposer la demande de permis d'aménager?

Si les règles actuelles vous permettent de faire votre projet, pas besoin d’attendre que le PLUi soit révisé.Le nouveau Plu sera opposable à l’approbation. Avant approbation, il y a une enquête publique durant laquelle vous pourrez allez voir si votre demande a été acceptée sur le nouveau zonage. Lors de l’enquête vous pourrez donner votre avis sur le nouveau zonage.

Dans le cas d'un permis d'aménager, les constructions sont elles soumises à la norme RE2020?

La RE2020 vient remplacer la RE2012 et prend en compte l’empreinte de l’habitat sur tout le cycle de vie. Elle est applicable que depuis le 1er Janvier 2022. Dans le cas du permis d'aménager, vu qu'on ne dépose pas de permis de construire donc aucun document qui détaille la taille et les plans des habitats, les habitats réversibles ne sont pas soumis à la RE2020.Attentionn, ce sera peut-être amené à évoluer…

Par rapport à la RE pour les habitats léger de loisir, consulter cette page.

Webinaire "S'installer légalement en habitat réversible" (2h)